La reprise et la poursuite du Plan THD passera par la levée de multiples blocages et par un réel soutien financier envers les sous-traitants en charge de tirer la fibre partout sur le territoire. La filière et le régulateur demandent le soutien des opérateurs.
Il faut voler à leur secours. « Il y a une kyrielle de TPE et PME qui n’ont qu’une semaine de cash devant eux. Certaines sont déjà mortes. Les autres, il faut bien sûr les faire travailler, mais pas au même prix », lance Etienne Dugas, président d’Infranum, la fédération des industriels de la fibre et du numérique.
A l’heure où le déploiement de la fibre dans l’hexagone subit un fort coup de frein avec un nombre de prises déployées par jour passé de 19 000 à quasiment zéro, la filière et l’Arcep appellent les opérateurs à soutenir sans relâche leurs sous-traitants pour éviter la catastrophe et stopper un délitement progressif de ces acteurs, indispensables à la poursuite du déploiement de la fibre.
Si la Fédération française des télécoms représentant notamment Orange, SFR et Bouygues (mais pas Free) a récemment appelé à la mobilisation tous les partenaires publics pour que “tout soit mis en oeuvre pour les aider à déployer” et ce même au ralenti, l’Arcep par la voix de son président Sébastien Soriano a pour sa part demandé vendredi dernier “formellement aux opérateurs de faire l’effort nécessaire dans la période de crise pour maintenir à flot tout leur tissu de sous-traitants. Ils ont certes des contraintes, mais ils sont protégés par le modèle de l’abonnement et ils vont un peu moins mal que le reste de l’économie.”
Des opérateurs viennent en aide à leurs sous-traitants
En réaction, Orange et Bouygues ont pris des mesures de soutien. Selon les informations des Echos, l’opérateur historique “va payer ses sous-traitants « prioritaires » entre 10 et 30 % plus cher au mois d’avril”. De son côté, Bouygues offre une prime de 20% selon les cas, pour un total de 2 millions d”euros pour le moment.
Si SFR n’a pas réellement communiqué sur ce point, l’opérateur de Xavier Niel a pour sa part soulager la trésorerie de ses 700 fournisseurs TPE/PME en réglant leurs factures en attente sans attendre le délai légal de 45 jours fin de mois, 90 millions d’euros ont dores et déjà été débloqués. Iliad a également lancé récemment un fonds de solidarité baptisé “Solid-19” dont l’objectif est de permettre aux petites et moyennes entreprises concernées de “renforcer leurs fonds propres et leur trésorerie, mais aussi d’avoir recours, le cas échéant, à de l’endettement auprès des banques.”. Une première tranche de 10 millions d’euros est immédiatement a déjà été mise à disposition.
La situation est donc urgente d’un point de vu opérationnel mais aussi financier. La fédération des industriels de la fibre ne cesse tirer la sonnette d’alarme pour éviter un arrêt complet de la production au 2nd semestre 2020 . Cet arrêt pourrait entraîner “une perte de chiffre d’affaires de plusieurs milliards d’euros et la mise au chômage technique de 20 000 collaborateurs dès ce trimestre, dont de possibles licenciements et un réemploi très progressif, c’est-à-dire partiel jusqu’au début 2021”.
Productivité en baisse et blocages
Aujourd’hui, le constat est sans appel, 30 % des équipes sont en action avec une productivité en baisse de 40 %, informe InfraNum. Les blocages sont multiples au-delà du chômage technique des sous-traitants, il y a aussi la fermeture d’entreprises de distribution de matériaux de construction, le manque de masques, la difficile distanciation des techniciens sur les chantiers, mais aussi l’interdiction de certaines collectivités de déployer. Face à cela, l’Assemblée des départements de France a appelé ces derniers jours toutes les collectivités à faciliter la continuité du déploiement des réseaux FttH et mobile. Sans oublier enfin le problème d’accès aux poteaux d’Enedis en cas de pose de fibre en aérien et la priorité chez les grands opérateurs donnée à la maintenance au lieu des raccordements.
De nouvelles mesures
Selon le quotidien, une nouvelle ordonnance devrait passer le 20 avril en conseil des ministres. elle permettra “d’alléger les formalités de voiries ou réduire les délais de recours”. En zone rurale et plus particulièrement sur les réseaux publics, la Banque des territoires va anticiper certains paiements. Mais la filière attend davantage de l’Etat, comme un fond de relance. Pour le moment, l’exécutif ne semble pas aller dans ce sens.